Dans la ville où j'ai grandi, je me souviens d'une population "united colors" il y avait vraiment de tout: noirs, blancs, arabes, asiatiques, indiens.... Toute mon enfance, j'ai fréquenté ces personnes aux origines et aux histoires différentes. Mes anciennes photos de classe témoignent bien de ce brassage culturel et ethnique. Pour moi, c'était normal, tout à fait à l'image du melting polt véhiculé par les séries américaines des années 90 que je voyais à la télévision. Entre nous, il n y avait aucune barrière, aucune tension, aucun racisme. Je me remémore l'immeuble H.L.M où je vivais au 6ème étage avec mon voisin du dessus Halim d'origine algérienne et mon voisin du dessous Vincent d'origine portugaise et avec qui je m'amusais quand nous n'avions pas école. Nos parents se saluaient, discutaient souvent ensemble, se rendaient quelques fois des petits services. Je garde QUE d'excellents souvenirs !! À aucun moment, je n'ai relevé la moindre animosité, et encore moins les symptômes d'un quelconque repli communautaire. Chaque année scolaire, je changeais de meilleure amie et j'ai le souvenir d'une petite blonde aux yeux bleues, puis d'une asiatique rondelette, d'une arabe à lunettes.... bref vous l'aurez compris dès mon plus jeune âge, je m'attachais plus à la valeur des personnes qu'à leur couleur de peau et je pensais que tout le monde raisonnait de cette façon!
Puis un jour, tout ceci est parti en miettes. Ma représentation du monde, comment j'appréhendais les choses, ToUT fut chamboulé lorsque j'ai pris conscience que j'étais noire!!
Ce que je veux dire par là c'est que soudainement j'étais confrontée à des gens qui me renvoyaient uniquement à ma principale caractéristique physique, ma couleur de peau noire qui est censée résumer, identifier ma personnalité, mes goûts, mes envies.
Cet homme blanc au premier rendez-vous galant qui me demande quels genres de musique j'écoute et me devance en affirmant que je devais probablement écoutée du rap, r'n'b et soul - ce qui n'est pas du tout faux lol . Ou celui qui me propose de finir la soirée chez lui (dans son lit bien-sûr!!!) et face à mon refus, me retorque que je devrais arrêter de faire ma "française" et que, en gros nous les noires, on est pas très difficile pour ça, qu'on est des grosses sauvages qui aiment le sexe - oui oui moi aussi j'ai halluciné en entendant cela - mais c pour ça qu'on est des bons coups!!!! - ah bon??? c'est marrant parce que je crois bien que les noirs affirment les mêmes choses sur les blanches, sans le côté sauvage. Aïe aïe aïe.
Enfin, encore des imbéciles qui font de leur expérience toute une généralité. PATHÉTIQUE! - Ah et j'allais oublier l'exemple de cette petite beauf avec qui je traînais à la fac. On commençait tout juste à se voir en dehors des cours quand elle décida de me confier ses premières impressions sur moi. La première fois qu'elle m'a vu, elle pensait que j'étais une "racaille".
Gros CHOC... je me sentais tellement vexée! je me demande encore aujourd'hui quel rapport il y a entre une "racaille" et moi, surtout qu' à la fac je n'ai jamais porté de jogging et je n'ai pas le souvenir d'avoir utilisé un langage ordurier comme j'aime le faire maintenant à la LIL Wayne - si si fuck Bitches... Oops faut que j'arrête les digressions lol - et le comble dans tout ça, elle ajoute - pour me consoler ou se rattraper je ne sais pas - que finalement elle était heureuse de me connaître, que pour elle je n'étais pas vraiment noire (????????) parce que je m'exprimais bien et que je faisais de longues études.
Ah bon je ne suis pas noire??!!!! mais alors de quelle couleur suis-je? - on va dire que je suis métisse alors!!!
C'est hallucinant les bêtises que peuvent sortir les gens avec autant de naturel. Je lui ai conseillé de lire "la lepénisation des esprits " de Pierre TÉNAVIAN pour qu'elle se rende compte du caractère raciste de ces propos. Sur le moment, elle n'a rien dit. Mais en se revoyant à la fac, une dispute à propos de notre exposé en commun et le tour était joué j'étais débarrassée de cette profonde abrutie.
Ces petites anecdotes m'ont sérieusement ébranlée. Après ma première déception sentimentale, je me suis mise à lire des tonnes de livres et j'ai découvert cet auteur TÉNAVIAN - mon mentor - qui m'a aidé à me construire intellectuellement et m'a donné les outils pour me défendre face à ce genre de personnes qui malheureusement concerne plus de gens qu'on ne le croit et je ne parle pas que des blancs! Tout le monde a des préjugés sur tout le monde. Beaucoup véhiculent des stéréotypes supers cons sur les noirs mais comme ils ont des potes noirs ben du coup ils sont excusables et certainement pas racistes!!
Les gens n'ont pas conscience de l'importance des mots, de la portée des propos qu'ils tiennent, de ce que cela signifie pour l'autre . Je ne supporte pas les gens qui disent "vous les noirs...." c'est tellement réducteur...
Même ceux qui ont les meilleures intentions - je fais référence à certaines personnes blanches passionnées par la culture négro-africaine - et sont les premiers à sortir les plus lourds stéréotypes sur les noirs. Les gens amalgament toujours cultures et traits physiques!!!
Pendant un moment, je m'informai énormément sur ces questions surtout qu'elles devenaient importantes après les révoltes dans les cités- ghettos (des lieux vraiment indignes pour un pays riche comme la France) en novembre 2005. Il y avait de nombreux articles, débats et livres sur la question noire en France. Quand on voit l'ampleur du problème, de l'étendue des dégâts, comment ce racisme larvée est quasiment rentré dans les moeurs, on peut très vite péter un plomb. La tentation est grande de se réfugier dans un certain communautarisme si ce n'est dans un racisme à l'envers.
Les mentalités vont elles changer? j'espère bien mais pour l'instant ce n'est pas gagné!
je crois en l'homme, à ses facultés de compréhension ms il faut lui donner les bonnes armes l'informer au mieux, même si c'est en partie à cause des grands médias qu'un lexique méprisant et simplificateur a pu autant proliférer et se banaliser.
Je pense qu'il est de mon devoir d'alerter, de sensibiliser les gens sur ces problèmes et pour cela quoi de mieux que le journalisme.
Je ne prétends pas pouvoir changer le monde mais je sais aujourd'hui que ma seule vocation est de fournir à mes concitoyens les moyens de "mieux" penser et ne plus être influencer par les discours tendancieux attisant le mépris et les haines. Et peut-être pourrons nous agir efficacement tous ensemble!!!